Comme chaque année, depuis 12 ans, l’association égyptologique du Gard organise sa rencontre avec un panel d’intervenants toujours aussi passionnant. Le représentant de la mairie a profité de l’introduction à la journée pour parler du futur musée de la romanité qui ouvrira dans un peu plus d’un an, près des arènes.
Tell el-Iswid
La première conférence abordait un site du Delta inconnu du public : Tell el-Iswid. Nathalie Bouchez a présenté les premiers résultats des fouilles. Tell el-Iswid est intéressant pour l’histoire de la Basse Égypte et du Delta, car il date du 4e millénaire. Le site date clairement des cultures dite de Basse Égypte avant que la culture nagadienne (culture dominante de Haute Égypte) ne domine toute l’Égypte et “élimine” les cultures de Basse Égypte. Il y a une forme d’unification culture, on parle parfois d’acculturation de la Basse Égypte. Cette domination culturelle précède ou suit le processus d’unification du pays impulsé par le Sud du pays.
Nathalie Bouchez rappelle que l’on connaît très peu de site d’habitat de cette époque dans la Delta et plusieurs questions se posent :
— quelle est la structure socio-économique des cultures de Basse Égypte ?
— qu’est-ce qui caractérise la transition ?
L’équipe française fouille le site depuis 2006, mais sa découverte remonte à 1987. La première étape de la fouille fut la prospection de surface et géophysique pour déterminer la ou les zones à fouiller. Depuis 2010, un secteur est fouillé. Des traces de construction avaient été repérées par la prospection magnétique. La découverte est intéressante, car il s’agit d’un grand ensemble domestique qui a évolué sur une période d’environ 200 ans, mais dont les phases ne sont pas simples à suivre à cause des multiples remaniements.
D’emblée, on peut se demander pourquoi la construction a subi autant de modifications. Illustration de la mutation de la société ? Et finalement, qu’est-ce qu’une unité domestique si on peut la définir pour cette période ?
Les archéologues distinguent trois grands états, en résumé :
— état 1 : un grand espace avec des longs murs. Structure de type monocellulaire. Est-ce une enceinte ? Est-ce le plan d’origine ?
— état 2 : on retrouve les longs murs, mais il y a des modifications dans la circulation et les entrées. Il y a plus de constructions. Il y a clairement 2 ensembles : un au nord, un au sud, au lieu, une grand cour qui semble devenir un espace privé. L’ensemble nord a permis de découvrir des lames de silex, un fragment d’une tête de massue et une inscription au nom du “roi” Iry_hor. Cette découverte est importante, car il s’agit du prédécesseur de Narmer, fin de la dynastie 0.
— état 3 : l’organisation spatiale évolue. Aucun parallèle n’a été découvert sur le site. Est-ce une marque d’une plus grande distinction des espaces et de leur usage. Les espaces deviennent privés (évolution de la vie sociale ?).
La fouille des couches les plus basses, celles des cultures de Basse Égypte, montre que l’architecture est légère et non maçonnée comme à Nagada. Les parois sont végétales, des pierres sont utilisées mais en quantité limitée. Il existait des espaces couverts et ouverts. Il existait des espaces de combustions et de conservation. L’architecture domestique est clairement pluricellulaire. Nous sommes dans un contexte villageois, avec une faible économie.
Cependant, la mission est tombée sur une structure en brique crue étonnante et qui pose question. Cette construction date de la fin de la culture de Basse Égypte. Ces murs sont épais et ressemblent à une enceinte. Elle pourrait être une filiation entre l’architecture de Basse Égypte et nagadienne. Une structure identique ( ?) a été découverte sur le site de Tell Farkha. L’origine de cette architecture nouvelle pose question :
— est-ce une invention locale ?
— est-ce une technique importée de Mésopotamie ?
— une influence de la culture nagadienne avant sa domination ?
Difficile pour le moment de conclure et il faudra comprendre son utilité. Pour le moment, aucune trace d’activité cultuelle n’a été découverte.
Les caches cultuelles dans l’Égypte ancienne
Cette seconde conférence a été assurée par Guillaume Charloux et a évoqué les caches cultuelles en Égypte. Le chercheur revient sur les nombreuses fosses contenant des objets à travers toute l’Égypte. Il est longuement revenu sur la très belle découverte derrière le temple de Ptah à Karnak. Il y a 3 ans, une fosse, aménagée dans l’axe de la chapelle de Ptah, fut découverte. Des dizaines d’objet furent découverts et notamment un fragment d’une statue divine de Ptah, tourné vers le temple. Ce détail est important. Surtout, le chercheur met en évident que des statuettes d’Osiris étaient déposés autour de la statue et un sphinx avait été déposé au-dessus de l’ensemble. Cet aménagement structuré démontre que nous sommes devant une sépulture pour la statue du dieu. Le sphinx, dans son positionnement dans la fosse, est là pour protéger la statue divine. C’est une analyse très intéressante et montre clairement que toutes les fosses avec des artefacts cultuels ne sont pas de simples fosses faites à la va-vite. Se pose la question : est-ce que l’on peut imager des fosses sépulcrales divines identiques dans d’autres temples ?
Pour plus de détails sur la cachette de Karnak, reportez-vous au dossier paru dans Pharaon Magazine n°28.
La suite du résumé prochainement.
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