Ramsès XI n’a jamais beaucoup attiré ni les égyptologues, ni le grand public. Très mal connu, le dernier Ramsès a des origines inconnues, est-il le fils de Ramsès X ou un rejeton d’une autre branche ramesside ? Il eut un long règne de 27 ans que l’on divise en deux parties : de l’an 1 à l’an 19 et de l’an 19 à l’an 27.
Une manœuvre qui aurait pu fonctionner
A Thèbes, Amenhotep dirige toujours le temple de Karnak et étend peu à peu son influence sur l’ensemble de la région et des rouages économiques et administratifs. L’armée égyptienne est stationnée dans le Nord et le pharaon ne quitte plus sa capitale. Dans les mois qui suivent son couronnement, Ramsès XI cherche une solution pour reprendre le contrôle de la situation et réduire le pouvoir (réel ou supposé) du grand prêtre d’Amon. Il ordonne le mouvement d’une partie de son armée à Thèbes (composée majoritairement de soldats nubiens), sous le commandement du généralissime, et vice-roi de Nubie, Paneshy
Le roi accorde à son général une concentration inédite du pouvoir : commandant de l’armée, responsable des greniers, réduisant ainsi le pouvoir du grand prêtre et de son clan. Les objectifs de Ramsès sont clairs : restaurer l’autorité royale, améliorer l’approvisionnement en céréales de la région, sécurisé Thèbes et la Haute Egypte, repousser les razzias des « Libyens », reprendre les travaux dans la vallée des rois. Mais Ramsès crée un précédent inédit : un officier a les pouvoirs militaires et économiques.
La réussite du coup de force du roi dépendait des capacités du général à fédérer autour de lui les fonctionnaires et les sympathies de la population, tout en faisant respecter une discipline de fer à ses soldats. Mais, Paneshy s’installa dans une ville de Thèbes favorable au grand prêtre.
Vers la guerre
Nous ne savons pas exactement quand la guerre civile éclata en Haute Egypte. En l’an 9, les archives du village de Deir el-Médineh évoquent la force des étrangers. Qui sont ces étrangers qui terrorisent et pillent la région ? Andrzej Niwinksi pense qu’il s’agit des Nubiens de l’armée royale commandée par Paneshy. L’anarchie est telle que les pillages des tombes et des temples se multiplient. Parmi les voleurs arrêtés par les autorités en l’an 9 de Ramsès, des officiers de Paneshy ! Le procès eut lieu, présidé par Paneshy en personne ! Aucune condamnation lourde ne fut prononcée. D’autres procès eurent lieu en l’an 12 et l’an 19 de Ramsès. Preuve que les pillages n’avaient jamais cessé. Et surtout, les tombes royales de la Vallée des Rois seront peu à peu la cible des pilleurs. Paneshy laissa faire. Il n’allait pas condamner sa propre armée. Les voleurs et receleurs se trouvaient dans l’ensemble de la population : paysans, soldats, officiers, fonctionnaires et même dans le personnel du clergé d’Amon ! Pour la population, la première préoccupation était de se nourrir, les prix des céréales ne cessaient de monter (toute proportion gardée, c’est comme si le litre d’essence valait 1,50 € puis 10 € quelques mois plus tard).
La complaisance de Paneshy peut s’expliquer par une complicité du personnage ou pour un intérêt financier sur les vols…
Ramsès XI était-il au courant de la situation en Haute Egypte ? Pourquoi n’a-t-il pas agi immédiatement pour établir l’ordre ? C’est seulement en l’an 17 que pharaon réagit enfin fermement. Il ordonne l’évacuation de son général et de son armée de Thèbes pour prendre la direction du Sud. Une lettre royale détaille les ordres. Paneshy doit rencontrer un autre fonctionnaire royal, Ines, sans doute envoyé par le roi pour espionner le général. Peu après, une « inspection royale » arrive à Thèbes. Ramsès veut reprendre la main sur l’administration et la gestion économique. La vallée des rois et le village des ouvriers sont visités par le vizir (an 18).
La guerre contre Amenhotep
Quelques mois après son éviction, notre général ostracisé veut prendre sa revanche et revient en force avec une armée nubienne. Cette contre-offensive sera violente. C’est ce que l’on appelle « la guerre contre Amenhotep ».
Qui s’oppose à qui ? Traditionnellement, on pense qu’il s’agit d’une offensive des armées royales de Ramsès contre le grand prêtre d’Amon, le roi chercha à l’expulser de Thèbes, ou d’une insurrection de la population contre Amenhotep.
En relisant attentivement la longue analyse de Andrzej Niwinksi, il nous semble nécessaire de réécrire cette guerre. Andrzej Niwinksi a relu et réanalysé tous les documents et les fouilles archéologiques à Médinet Habou concernant cette guerre : : le grand prêtre s’enferme dans Médinet Habou suite aux violences menées par le général rebelle. Le siège dure plusieurs mois et les assiégeants (l’armée nubienne) sapent et détruisent méthodiquement les fortifications de Médinet Habou. Cela prouve que les assiégeants sont des soldats professionnels, pas une population en révolte. Les murailles de Médinet Habout (datant de Ramsès III) mesurent jusqu’à 10 mètres de hauteur !
L’anarchie règne partout à Thèbes. La population est affamée, les prix de la nourriture explosent. Durant cette guerre, les pillages et destructions se multiplient : la vallée des rois qui n’est plus surveillée (ou très mal) est pillée et saccagée, ainsi que les temples. Karnak est envahi par les ennemis. Impossible de dire combien de morts cette guerre a engrendrés, des centaines, des milliers. L’administration ne contrôlait plus rien. Ramsès XI n’avait plus aucune autorité en Haute Egypte. Cette désastreuse situation dura de longs mois (1 an ?). Par miracle (par complicité ou par une chance inouie), Amenhotep réussit à fuir de Médinet Habou et de Thèbes pour se réfugier loin dans le Nord.
Nous sommes en l’an 19 de Ramsès XI. Un miracle va pourtant se produire avec l’arrivée de l’armée du Nord sous la conduite d’Hommes Nouveaux. Ces hommes vont agir à Pi-Ramsès et à Thèbes. Cette nouvelle autorité remplace l’autorité royale qui n’existe plus. C’est le début de la royauté théologique d’Amon dans laquelle les grands prêtres d’Amon prendront définitivement le pouvoir.
Vers une nouvelle royauté égyptienne : Amon, roi d’Egypte
Que se passe-t-il à Pi-Ramsès durant la guerre contre Amenhotep ? Le pouvoir royal est sans aucun doute tenu au courant de la situation mais alors pourquoi Ramsès XI n’a-t-il pas ordonné l’envoi de l’armée plus tôt ? A-t-il encore une autorité réelle à Pi-Ramsès sur l’armée et l’administration ?
La suite de cette passionnante enquête dans PHARAON MAGAZINE n°17, actuellement en kiosque
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