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ScanPyramids : enfin des réponses à la construction des pyramides ?

Le projet ScanPyramids a été officiellement lancé ce dimanche. La mission sera menée par l’Université du Caire, l’Institut français HIP, et plusieurs institutions. Cette mission inédite sera d’ausculter plusieurs pyramides « de loin » sans intrusion physique par des techniques très avancées.

« La mission scientifique “Scan Pyramids” qui commencera début novembre est d’une ampleur jamais atteinte. Elle portera sur quatre chefs d’œuvre de la IVe dynastie (2575 — 2465). La pyramide Sud, dite rhomboïdale, et la pyramide Nord, dite pyramide rouge, bâtie par Snefrou (2575 — 2551) sur le site de Dahchour, à une quinzaine de kilomètres au sud de Saqqarah ; ainsi que les pyramides de Kheops et Khephren, fils et petit-fils de Snefrou, élevées sur le plateau de Gizeh à une vingtaine de kilomètres du Caire. » précise la présentation officielle.

Les équipes vont utiliser la radiographie par muons (particules cosmiques), thermographie infrarouge, photogrammétrie, scanner.

Des techniques de pointe, non destructives, seront mises en œuvre. Deux missions de thermographie infrarouge, l’une de courte durée menée par le spécialiste Jean–Claude Barré de LedLiquid l’autre qui s’étendra sur une année au moins, conduite par l’université Laval de Québec, permettront d’établir une carte thermique des monuments et d’y révéler des vides sous la surface visible de la pyramide. Deux missions de radiographie par muons, développées au Japon par les équipes du KEK (High Energy Accelerator research Organization) et l’université de Nagoya, ont quant à elles pour objectif de vérifier et visualiser avec précision la présence de structures inconnues au sein des pyramides. « De nombreuses théories ont été proposées, à la fois pour leur construction et leurs anomalies de structure, mais nous sommes des physiciens et des ingénieurs, pas des archéologues », insiste le professeur Hany Helal, professeur et ancien ministre de la recherche et de l’éducation supérieure, qui dirige la mission pour la Faculté des Ingénieurs du Caire. « Notre objectif est d’utiliser des techniques pour obtenir des résultats concrets. Aux égyptologues ensuite de les interpréter. »

Parallèlement aux missions d’exploration, la société Iconem réalisera, à l’aide de drones, une campagne de photogrammétrie qui permettra de reconstituer en 3D, avec une précision centimétrique jamais atteinte, le plateau de Gizeh et le site de Dahchour, ainsi que tous les monuments qui y sont érigés. Ces modélisations seront mises à disposition des chercheurs et du public, en open data, par l’institut HIP, une structure d’intérêt général à but non lucratif.

Le but est de mieux connaître l’intérieur des grandes pyramides pour déterminer plusieurs éléments :

-       existence ou non de vides ou de salles inconnues

-       déterminer la structure intérieure des pyramides

-       et donc essayer d’en savoir plus sur la construction des pyramides

Plusieurs grandes pyramides (dont celles de Dahshour, les deux grandes pyramides de Gizeh, à savoir Kheops et Chéphren) possèdent encore leur maçonnerie et pierre ce qui ne permet pas de savoir comment a été construire le cœur même du monument. Pour d’autres pyramides (Meidoum, pyramides de Saqqarah Sud), nous savons enfin qu’elles furent construites en 2 étapes :

-       un noyau central en degré (architecture utilisée pour la pyramide de Djoser)

-       puis poser d’une maçonnerie fine et du revêtement

Cette méthode permettrait d’économiser du temps et le noyau n’a pas besoin d’être parfaitement réalisé. Pour les pyramides de Snéfrou, Kheops et Chéphren, cette hypothèse a été émise depuis de nombreuses années. Chez Mykérinos, il semblerait que cette technique ait été utilisée selon une étude très complète menée par Dormion. Plus récemment, Michel Michel avait proposé une approche similaire pour la construction.

Cette étude permettra aussi de valider ou de supprimer certaines théories de constructions comme celle proposée par J-P Houdin avec un système de couloirs intérieurs.

Toutes technologies permettront (on l’espère) de mesurer les densités, les masses de pierres et voir comment respire la pierre. Car la pierre respire et selon la « respiration » détectée, on pourrait déduire certaines données.

 

Mais attention, soyons clairs, cette mission ne donnera pas la méthode de construction des anciens Égyptiens, mais permettra de mieux connaître, si tout va bien, la composition interne des pyramides analysées et cela sera déjà un grand progrès. On peut espérer une véritable avancée concrète et scientifique. Nous savons déjà que les pyramides de la 4e dynastie peuvent contenir des salles inconnues comme l’avait prouvé à une mission française menée en l’an 2000 dans la pyramide de Meidoum. Mais ces analyses et résultats ne seront finalement qu’une première étape, car il faudra, d’une manière ou d’une autre, vérifier in situ les données, si cela est possible, car rien ne remplacera l’archéologie de terrain.

« L’essentiel est d’avancer en mettant en œuvre de nouvelles approches, conclut Mehdi Tayoubi. Beaucoup de missions précédentes ont tenté de percer les mystères des pyramides et si elles n’y sont pas parvenues, elles ont chacune fait progresser la connaissance comme ce fut le cas, par exemple, il y a tout juste trente ans quand la mission de la fondation EDF a décelé une anomalie de sous-densité en forme spiralée dans Kheops. Notre objectif est d’apporter notre pierre à l’édifice et de préparer, en toute humilité, le chemin pour les futures missions de recherche scientifique. »

La mission devrait durée plus d’un an, au minimum. Elle ne se terminera pas avant fin 2016.

Les techniques utilisées (dossier officiel)

La thermographie infrarouge, mise en oeuvre par Jean–Claude Barré est l’une des méthodes les plus prometteuses pour tenter de comprendre, depuis la surface d’un monument, ce qui se passe sous les faces. Le principe en est simple, mais sa mise en oeuvre demande des instruments sophistiqués, et des opérateurs très expérimentés.

Elle repose sur une loi physique : tous les matériaux rayonnent de l’énergie en fonction de leur température. Ils émettent des ondes infrarouges que mesurent des caméras équipées de capteurs. Grâce à un modèle numérique, celles–ci génèrent des images dont chaque couleur correspond à une température donnée. Intérêt de cette technique largement utilisée pour révéler la déperdition de chaleur dans les habitations mal isolées : elle permet de localiser, grâce aux anomalies de l’image thermique obtenue, la présence de défauts dans le bâtiment. Ainsi, un courant d’air froid à l’intérieur se signalera par une zone bleue, une source de chaleur par une zone rouge. Ces caméras sont aussi capables de quantifier l’émissivité des matériaux. Tous, en effet, n’absorbent pas, ne transmettent pas, et ne réfléchissent pas les rayonnements de la même manière. « Sous le même soleil, l’habitacle d’une voiture blanche sera moins chaud que celui d’une voiture noire, illustre Jean–Claude Barré. De la même façon, sous un soleil identique, granit et calcaire ne renverront pas la même température. »

Application dans les pyramides : les différences d’émissivité peuvent permettre de vérifier si les pierres de surface, qui ont toutes aujourd’hui la même couleur en raison des intempéries, du sable et de la pollution, sont de même nature. « Mais ce qui nous intéresse surtout, ce sont d’éventuelles zones froides qui pourraient révéler des courants d’air, donc des cavités, des chambres ou des couloirs, à l’intérieur des monuments », poursuit Jean–Claude Barré.

C’est une véritable carte thermique des géantes de Dahchour et Gizeh, qu’il se propose de réaliser. Une carte dynamique. Car les pyramides, comme tout bâtiment, absorbent dans la journée la chaleur du soleil, et en restituent une part la nuit. Le programme de l’opérateur est donc le suivant : réaliser des images sur les quatre faces une demi-heure avant le lever du soleil, lorsque le monument, ayant évacué un maximum d’énergie pendant la nuit, sera le plus froid. Et à partir de ce point 0, qui servira d’étalon, renouveler l’opération à midi et le soir. En quelques jours, Jean–Claude Barré enregistrera ainsi des centaines de milliers d’images qui seront comparées entre elles par un programme informatique. Les pyramides dévoileront peut–être alors certains de leur secrets, en bleu ou en rouge !

Thermographie modulée

La thermographie infrarouge est couramment utilisée en industrie aérospatiale pour le contrôle non destructif des matériaux. Le principe de la mesure est le suivant : la matière, l’objet ou la structure à l’essai est d’abord légèrement chauffée. Si un défaut interne, donc une anomalie non visible est présente, la signature thermique correspondante révélera sa présence par de légères différences de température en surface. Cette signature n’est pas instantanément mesurable, elle n’apparaît qu’après un temps donné qui est fonction de la profondeur de l’anomalie et de ses caractéristiques propres. Les mesures thermiques sont réalisées par une caméra infrarouge. Celle-ci enregistre l’évolution de la température en surface sous la forme d’images thermiques en fonction du temps. Un certain nombre de techniques sont disponibles pour améliorer ensuite les images thermiques obtenues, détecter et caractériser les défauts. De même, différentes techniques de chauffage existent pour stimuler l’objet ou la structure à l’essai. L’une de ces techniques consiste à moduler la source de chauffage de manière répétée suivant un motif donné (par exemple un sinus) et enregistrer la réponse thermique obtenue avec la caméra infrarouge.

Les images enregistrées sont ensuite traitées et réduites à une seule image qui condense toutes les informations reliées aux anomalies internes de l’objet. Dans le cas de grands objets tel un immeuble, le rayonnement solaire constitue une source de chauffage modulée intéressante, offrant des variations périodiques naturelles sur une grande surface (par exemple le cycle quotidien jour / nuit). Fait intéressant, plus la variation périodique du chauffage est lente, plus l’onde thermique engendrée pourra pénétrer profondément dans le matériau. Ainsi, une onde thermique produite par un cycle jour / nuit est capable de sonder plusieurs centimètres dans un mur en béton, tandis que les variations thermiques causées par le cycle annuel des saisons (température chaude l’été et froide l’hiver) engendrent des ondes thermiques pouvant pénétrer plus profondément encore. Les variations thermiques saisonnières annuelles sont donc l’approche privilégiée pour l’étude de la pyramide en quête de possibles cavités internes proches de sa surface.

Muons

Les muons, qui tombent sur le sol presque à la vitesse de la lumière avec un débit permanent d’environ 10 000 par m2 par minute, proviennent des hautes couches de l’atmosphère terrestre, où ils ont été créés lors de collisions entre des rayons cosmiques issus de notre environnement galactique et les noyaux des atomes de l’atmosphère. A l’instar des rayons X qui traversent notre corps et permettent de visualiser notre squelette, ces particules élémentaires, sorte d’électrons lourds, peuvent traverser très facilement même des roches de grande épaisseur, telles les montagnes. Des détecteurs, placés aux endroits judicieux (par exemple à l’intérieur de la pyramide, sous une possible chambre encore non détectée), permettent, par accumulation dans le temps des muons, de discerner les zones de vide (que les muons ont traversé sans problème) et les zones plus denses où certains d’entre eux ont pu être absorbés ou déviés. Tout l’art de la mesure consiste à réaliser des détecteurs extrêmement sensibles - soit des gels de type émulsions argentiques, soit des scintillateurs. Puis à accumuler assez de données (pendant plusieurs jours ou mois) pour accentuer les contrastes. La radiographie par muons est aujourd’hui fréquemment utilisée dans l’observation des volcans, notamment par les équipes de recherche de l’université de Nagoya. Plus récemment le KEK a développé une approche de détection à base de scintillateurs électroniques résistants, contrairement aux émulsions chimiques, aux radiation nucléaires, afin de scanner l’intérieur des réacteurs de la centrale de Fukushima.

Photogrammétrie & laser

A la base de la photogrammétrie, il y a des algorithmes informatiques. Ils permettent, à partir d’une grande quantité d’images prises de points de vue différents, de reconstruire un objet 3D. Les algorithmes qu’utilise Iconem ont été mis au point par l’Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique). La grande nouveauté – déjà développée par la société Iconem à Pompéi, en Syrie et en Afghanistan, pour reconstituer des sites menacés – est que les appareils photographiques seront embarqués à bord d’engins volants téléguidés.

Pour cette mission, Iconem utilisera deux types de drones. « Tout d’abord, des drones type ailes volantes, avions, détaille Yves Ubelmann. Grâce à leur autonomie, ils nous permettront d’obtenir des données sur de grandes surfaces et de modéliser l’environnement des pyramides à 5 centimètres près. » De quoi positionner très précisément tous les monuments, de repérer les niveaux et pentes, et éventuellement les traces d’anciennes rampes par lesquelles les matériaux ont été acheminés au moment de la construction. « Les détails de la micro–topographie nous donneront aussi des indices sur la position ou la forme de bâtiments non encore fouillés et qui sont visibles uniquement à travers la forme du terrain ».

Les drones du deuxième type ressemblent d’avantage à des hélicoptères. Ils ont moins d’autonomie mais peuvent réaliser des vols stationnaires, prendre des images à quelques mètres des monuments, du plus haut au plus bas, suivre leurs pentes. Le détail sera, cette fois, de l’ordre du centimètre. Une définition qui donnera des informations géométriques, notamment sur l’alignement et l’assemblage des blocs. Mais aussi de texture, avec éventuellement des traces d’outils, de gestes de construction.

« La photogrammétrie permet de travailler et combiner différentes échelles, de les croiser dans le même modèle numérique, et de proposer une interprétation globale des sites », conclut Yves Ubelmann. Et pour parfaire cette vision inédite, son équipe réalisera à l’intérieur des monuments, dans ces endroits confinés et sombres où la photogrammétrie est peu opérante, des relevés au scanner laser.

Commentaires

Mon point de vue personnel en

Mon point de vue personnel en ce qui concerne l'anomalie thermique détectée sur des pierres de la face est de la grande pyramide.

http://autospeed.celeonet.fr/khufu/spip.php?article53

 

 

Super article clair

Super article clair François!

Une nouvelle aventure passionnante et un changement dans la politique du service des antiquités égyptiennes à 90` par rapport à l'ère Hawass!

Egypt-amicalement.

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