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Les Egyptiens au Sinaï : les terrasses de la turquoise au Moyen Empire, résumé

Pierre Tallet a proposé une très intéressante conférence à l’association AEREA du Chesnay mi-octobre. Le sujet concernait les expéditions égyptiennes durant le Moyen Empire au Sinaï. Mais il s’agissait aussi de comprendre l’étonnante omniprésence de la déesse Hathor, particulièrement au Sérabit el-Khadim. Le rôle économique du Sinaï n’est pas nouveau pour les Égyptiens. Ils sont présents dès la dynastie 0. La péninsule est un lieu de passage entre l’Égypte et le Proche-Orient. L’exploitation des ressources minières à l’Ancien Empire était considérable avec plus de 5 000 fours pour réduire le minerai de cuivre. 

Actuellement, le plus ancien site d’occupation est celui du Ouadi Ameyra avec des traces Nagada III et du roi Iry-Hor (dynastie 0). 

Pierre Tallet mentionne un élément important : le Sinaï comme frontière de l’Égypte et comme enjeu idéologique et politique pour les pharaons. En effet, plusieurs sites montrent le roi massacrant l’ennemi, le roi avec les différentes couronnes. Ces représentations sont là pour marquer le pouvoir égyptien et le contrôle sur le Sinaï.  

Les sites au Moyen Empire se multiplient et les sources sur les expéditions mentionnent 45 missions dont les deux tiers se concentrent sous Amenemhat III et IV. Cela démontre une activité intense de l’extraction de la turquoise et du cuivre. Le site du Sérabit el-Khadim, et son temple, est actif avec une extension massive du temple primitive et la multiplication des stèles mentionnant les expéditions. Et des dizaines de sites autour du grand temple montrent la piété des Égyptiens. Le temple d’Hathor est fondé à la 12e dynastie par Sésostris Ier et les mines passent de 15 à 35. 

Le temple se situe près des mines les plus riches. Il, dans sa forme définitive, part du grand pylône puis une succession de salles suit une allée processionnelle menant aux sanctuaires creusés dans la roche. Le tout est entouré d’un mur de pierre. Le grand sanctuaire est dédié à Hathor, le second appartient à Ptah, le grand dieu de Memphis. Comment comprendre la présence des deux divinités : Ptah fait référence à l’origine des expéditions, Memphis et Hathor est la protectrice de la monarchie. Elle est la déesse résidente des lieux et est liée par les Égyptiens aux ressources minérales, ici la turquoise. 

Dans la partie nord, un aménagement a été réalisé sous Amenemhat II avant d’être agrandi pour Amenemhat IV. Il s’agit de la chapelle des rois, liée aux ancêtres et à leur culte. Là des rites dynastiques s’y déroulaient. Des statues royales y furent découvertes, dont une au nom de Snéfrou, le “bon roi”. Les textes et les images font référence au dieu Geb, un des rois divins sur Terre et qui évoque le prototype du roi. Sans doute que la chapelle montrait un cycle royal et associée à l’économie (les ressources minérales). Avec Hathor et Ptah dans la chapelle, on démontre la stabilité de la monarchie face au monde extérieur (le Sinaï comme une frontière). D’autre part, deux fêtes Sed sont mentionnées dans le temple. Tout un circuit existait pour les statues royales que l’on transportait dans le temple. 

Le Sérabit el-Khadim possède de nombreuses stèles commémoratives qui détaillent les expéditions. Les chefs des expéditions sont à l’origine de ces stèles. Les textes décrivent parfois les équipes et la quantité de ressources extraites. Dans les mines, les archéologues ont aussi trouvé des stèles taillées dans la roche, évoquant par exemple l’ouverture de la mine, avec le nom de la mine. Là encore le nom des chefs d’expédition est indiqué. 

Les sites miniers sont dans les zones montagneuses, aux accès pas toujours simple. On pouvait y accéder depuis le site de Rob el Air et qui marque l’entrée vers le Sérabit el-Khadim. Là encore de nombreuses inscriptions d’Égyptiens furent gravées. Ce lieu permettait de contrôler l’accès et un petit village existait. 

Les données sur les équipes des expéditions montrent un personnel assez peu nombreux, quelques centaines de personnes comprenant les responsables, les majordomes, une équipe d’ouvriers spécialisés, une main d’oeuvre plus nombreuse, mais moins qualifiée, un personnel de liaison entre le Sinaï et l’Égypte et divers métiers étaient aussi présents (géologue, tailleurs, etc.). Une force d’appoint provenant du Negev aidait les Égyptiens à exploiter les mines. Cette présence d’Asiatiques peut expliquer la naissance d’une écriture proto-alphabétique (écriture sinaïtique). Des centaines d’ânes permettaient de transporter la logistique, la ravitaillement et les minerais extraits. Une liaison maritime était assurée entre le Sinaï et un port côté égyptien, sans doute Ayn Soukhna. 

On constate que les expéditions du Moyen Empire ne mentionnent pas de forces militaires / de protections contrairement aux missions de l’Ancien Empire plus massives et dans lesquelles les soldats étaient omniprésents. Comment expliquer cette absente de sécurité apparente ? Les Égyptiens craignaient sans doute moins les nomades, la région était mieux contrôlée. Les Égyptiens avaient des garnisons installées dans des fortins et qui sillonnaient le Sinaï. 

Une expédition dure sans doute entre 2 et 4 mois et se déroule entre mars et août. La meilleure période est sans doute entre juin et juillet. La turquoise est de meilleure qualité. La chaleur influence la couleur et son éclat. Quand une expédition partait du port de Ayn Soukhna, la troupe se divisait en deux : une grosse partie passait par la terre, l’autre (essentiellement le commandement, les équipes qualifiées) utilisait la Mer Rouge. Le port était sans doute l’élément clé pour la logistique et l’approvisionnement de la mission au quotidien.

Le culte d’Hathor s’impose

Hathor n’était pas une déesse vénérée avant le Moyen Empire. C’est avec Sésostris Ier que la divinité commence à s’y installer. La présence d’Hathor est sans doute imposée par la royauté et les expéditions royales. Car, depuis les origines, d’autres dieux étaient présents (Shot, Soped, Ash), mais pas Hathor. Mais peu à peu, Hathor s’impose, et remplace les autres dieux, par son lien avec la protection royale et la régénération du roi. On constate que la déesse s’impose de la même manière dans d’autres zones minières comme au Ouadi el Houdi, au Gebel Zeit ou encore à Toshka. Là encore, les équipes apportent leur dieu et certaines d’entre elles travaillaient aussi au Sinaï. Hathor s’assimile au minéral local comme la galène ou l’améthyste. 

 

Commentaires

Merci pour cet article, qui

Merci pour cet article, qui m'a permis de découvrir cette association.

Je l'ai contactée et j'espère pouvoir assister à de prochaines conférences.

Et merci pour votre magazine!

 

Pauline Lucas

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