Journée égyptologique de Nîmes : le compte-rendu

Le 21 janvier dernier, à Nîmes, l’association égyptologique du Gard a organisé sa traditionnelle journée égyptologique. Cette année le thème fut la sexualité en ancienne Egypte. Comme chaque année, les intervenants furent prestigieux. Nadine Guilhou ouvrit la matinée avec la sexualité des dieux et se concentra essentiellement sur les récits autour d’Isis, Seth, Osiris. En préambule elle rappela que le monde fut créé par la masturbation du Création et que les premiers dieux naissent sans qu’il y ait eu de relations sexualités. L’égyptologue évoque plusieurs textes dans les récits de Plutarque sur Isis et Osiris.

Marc Gabolde prit la relève avec les amours de la famille royale. Le grand spécialiste d’Akhenaton se concentra sur les reines durant les différents règnes et apporta quelques précisions sur les analyses ADN des momies royales de 18e dynastie. Pour lui, ces analyses dévoilés en février 2010 posent plusieurs problèmes. Tout d’abord, sur les fœtus de la tombe de Toutankhamon, si le roi semble bien être le père, Mais pour la mère, l’analyse est délicate : la mère potentielle a un ADN commun avec Toutankhamon. Est-ce une sœur, une demi-sœur ou un autre membre de la famille royale ? Est-ce réellement la reine Ankhensounamon ? L’ADN de la momie supposée de la reine de Toutankhamon (pour le moment nous ne connaissons qu’une reine à Toutankhamon) et des fœtus, est trop endommagé pour toute certitude. Gabolde parle aussi de l’ADN commun entre Aménophis III et Youya (mère de Tiyi). La famille de Tiyi est-elle lié d’une manière ou d’une autre à la famille d’Aménophis III ? Tiyi une cousine d’Aménophis III ? Pour la momie dite de la jeune dame, identifiée comme la mère de Toutankhamon, Hawass et d’autres ont conclu qu’il ne pouvait s’agir de Néfertiti car la « jeune dame » est une sœur d’Akhenaton et donc fille d’Aménophis III et de Tiyi. Mais pour Gabolde, cela pose tout de même un problème. S’il y a effectivement une proximité des familles de Touya – Youya et d’Aménophis III, l’ADN aura plus de mal à différentier une sœur d’une cousine proche. On peut conclure que la « jeune dame » est bien apparentée à la momie attribuée à Akhenaton, à Aménophis III et Tiyi mais aussi à Youya et Touya. D’autre part, Gabolde point un élément non négligeable : si la mère de Toutankhamon est une sœur d’Akhenaton et donc fille d’Aménophis III, pourquoi nous n’avons trouvé aucune mention, aucun texte le précisant, ce qui peut paraître surprenant. Bref, dans ces conditions, il devient plus difficile de placer dans l’arbre généalogique la « jeune dame » qui peut parfaitement, si on suit Marc Gabolde, être Néfertiti. Un article complet à paraître dans Pharaon Magazine (fin mars 2012).

Après une pause bienvenue, nous avons repris avec Florence Maruéjol sur le mariage en ancienne égypte. L’égyptologue retrace l’ensemble de la vie amoureuse des couples égyptiens. Pour plus de détail, nous vous invitons à lire et à relire notre hors série sexualité et amour en ancienne égypte de Pharaon Magazine.

 Pascal Vernus, très attendu, prend la scène et nous présente durant une heure le papyrus de Turin. Il veut aller au-delà des scènes érotiques / pornographiques et explique pourquoi il s’agit d’une transgression des codes sociaux, pourquoi les hommes sont « moches » et les femmes, des « top modèles ». Tout ceci répond à une transgression pour les élites. Il explique parfaitement pourquoi le papyrus érotique de Turin forme un papyrus complet réalisé en même temps, par le cadre entourant les scènes et surtout par les deux plans inclinés à chaque extrémité qui forme de facto le signe Akhet, le signe de l’Horizon des anciens Egyptiens ! M. Vernus revient aussi sur deux notions complexes de l’art : la stratégie de l’épure et la stratégie d’appogiature. Nous reviendrons sur ces deux notions importantes pour bien comprendre l’art égyptien.

 Jean-Pierre Patznick a conclu la journée par une conférence sur les prostituées en ancienne égypte. Les principales informations viennent de la période gréco-romaine avec une véritable organisation légale et d’Etat de la prostitution avec des « maisons closes municipaux », des taxes à payer. Certaines prostituées étaient mêmes reconnues et beaucoup demandées. Alexandrie a été le grand centre de la prostitution durant la période gréco-romaine mais d’autres cités comme Coptos étaient de véritables carrefours pour « alimenter » les villes en prostitués, notamment étrangères. Pour le Nouvel Empire, et même avant, les traces sont quasi inexistantes mais s’il semble bien exister une forme de prostitution mais pas réellement organisée. Pour Jean-Pierre Patznick, les chauves du papyrus de Turin sont des chauves d’Hathor (voir notre article dans Pharaon Magazine n°7), en contradiction avec l’analyse de Pascal Vernus. Pour nous, l’analyse de M. Vernus nous semble plus pertinente car la physionomie des chauves du papyrus de Turin, la calvitie et la chevelure désordonnée ne plaident pas pour y voir des chauves d’Hathor.

La journée a rassemblé plus de 150 personnes ! Un joli succès. Rendez-vous en janvier 2013 pour la prochaine édition !

Pour les photos : merci à Jeanine Dejean et Valérie Turmel